Le Gange, entre dévotion et pollution |
Le Gange, "Ganga Mama" pour les Hindous, est depuis les origines le fleuve le plus emblématique de l’Inde. Faisant partie des sept rivières sacrées du pays, ce dernier est encore considéré comme le fleuve le plus important dans la tradition hindoue. Son eau a en effet le pouvoir d'absoudre les péchés : "l'Amrita", ou élixir de vie, amènerait pureté aux croyants et une vie meilleure après la mort.
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Les dévots hindous exécutent de nombreux pèlerinages dans le but de se baigner dans ses eaux et de pratiquer la méditation sur ses berges. Plusieurs sites sacrés sont ainsi disséminés le long de ses rives, tels qu’Haridwar et Varanasi. Les hindous sont ici plus proches des dieux, plus particulièrement de Shiva. Fleuve sacré, pèlerins et habitants viennent y faire leurs ablutions quotidiennes pour se ressourcer, espérer l'absolution, mais viennent également pour y mourir.
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Mourir au bord du Gange est un privilège qui ne se refuse pas : il donne un accès immédiat au "Moksha" ou à l'illumination, permettant de sortir ainsi du cycle des réincarnations. Fleuve sacré mais aussi lieu de vie : des millions d'hindous s’y croisent quotidiennement sur les ghats afin d'y faire, non seulement leurs ablutions, prières et offrandes, mais aussi pour s'y laver, faire leur lessive, boire et vivre de leur foi. |
Malgré une importante pollution, le Gange est un écosystème riche permettant à des milliers de pêcheurs de survivre tout au long de son cours. Il comporte également plusieurs espèces endémiques : le crocodile du Gange, les dauphins du Gange et de l'Irrawaddy, ainsi qu'un très rare requin d'eau douce. En 1985, le fleuve sacré a été proclamé « héritage national » par le gouvernement indien. L'année suivante, de premières analyses ont été réalisées dans un affluent du Gange où se déversent les égouts de Varanasi, et qui se jette lui-même dans le fleuve en aval de la ville. Les résultats ont ainsi révélé un taux de coliformes fécaux de 1,5 million d'unités par décilitre, le maximum autorisé étant de 500 unités par décilitre...
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Malgré cette alarmante constatation, les dévots viennent encore invariablement y faire leur prière tous les matins à l'aube. Ils déclinent leurs ablutions en trois gestes : la salutation au soleil, l'immersion dans le fleuve sacré, et la gorgée du "nectar" de vie. Une nouvelle tendance apparaît cependant depuis quelques années : de plus en plus de fidèles dérogent en effet à la tradition en ne buvant plus l’eau du fleuve. |
Tout au long de son cours, des usines et des municipalités y déversent des déchets de toutes sortes : eaux usées dont la majeure partie n'est pas traitée, déchets jetés par les riverains (sacs en plastique, lessives, engrais et carcasses de bestiaux, etc), sans compter la multitude de cadavres qui y flottent.
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L’incinération est un élément essentiel dans la religion hindoue. Réduire en cendres le corps du défunt permet à l'âme immortelle qui erre sur terre de poursuivre son chemin, libérée de son enveloppe charnelle, et de renaître sous une nouvelle forme. Après la crémation, les cendres du défunt sont alors dispersées dans le fleuve sacré. De nombreuses familles hindoues n’ont malheureusement pas les moyens de payer suffisamment de bois pour permettre la crémation totale du corps de leurs proches. Les corps à peine calcinés sont ainsi jeté dans le Gange.
Pour ne rien arranger, la police et les services de nettoyage se débarassent également des corps non réclamés dans les puissantes eaux du fleuve.
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Selon des estimations, le Gange recevrait ainsi chaque jour les restes de quelque 400 cadavres humains accompagnés des quelques 1550 tonnes de bois utilisées pour les crémations. A cela s'ajoutent les 9000 carcasses d'animaux qui y sont abandonnées, autre cause importante de pollution. Face à ces déchets ainsi qu’aux milliards de litres d'eaux usées déversées quotidiennement dans les affluents du Gange, les capacités des quelques usines de traitement existantes sont malheureusement dérisoires.
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Diverses méthodes ont pourtant déjà été envisagées pour sa dépollution. On encouragea tout d'abord la mise en place de stations d’épuration et leur raccordement à des centaines de kilomètres d’égouts.
On construit enfin des milliers de toilettes publiques ainsi que de grands crématoires installés tout au long des Ghâts.
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Quelques crématoires de ce type sont déjà mis en place à Varanasi mais ils ne sont guère utilisés que par les indigents. Enfin, la solution visant à lâcher des milliers de tortues nécrophages, espérant que celles-ci dévorent les cadavres partiellement brûlés, fut un échec. Les reptiles furent en effet rapidement capturés et consommés par les pêcheurs et les riverains les plus pauvres...
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Mais quoi qu'il en advienne, le Gange restera le fleuve sacré de tous les Hindous à travers le monde.
Il fera encore longtemps espérer pèlerins et dévots qui continueront de s'y recueillir, mais aussi rêver les touristes qui peuvent y assister à la continuité d’une tradition et de pratiques remontant à des temps immémoriaux.
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