La jeunesse de Delhi à l'Amarnath Yatra
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Depuis une dizaine d'années, les Indiens issus des nouvelles classes moyennes ont gagné la possibilité de voyager, souvent à l'autre bout de leur pays. Grâce à ce nouveau privilège, beaucoup d'entre eux mettent ainsi à profit leurs vacances pour effectuer des pèlerinages religieux, acte de dévotion primordial pour tout hindou convaincu. C'est le cas du fameux pèlerinage de l'Amarnath Yatra, qui se déroule dans les montagnes du Cachemire indien, et qui n’est ouvert que deux mois par année. Depuis quelques années seulement, des jeunes venus des grandes villes y font leur apparition, loin de l'image traditionnelle que l’on se fait du pèlerin hindou.
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Je les ai rencontré au pied des montagnes cachemiries, alors que les camions et les voitures étaient bloqués par l'armée en raison d'un attentat à la bombe.
A l'instar de la majorité des voies d'accès à la province du Cachemire, les routes sont ici toutes protégées par les militaires de l'armée indienne. Dans certaines régions sensibles, on peut ainsi en apercevoir tous les cent mètres. Il n'est enfin pas rare que ces derniers bloquent les routes pour le passage d’énormes convois, ou pour fouiller les véhicules lors d'alertes à la bombe.
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J’ai rencontré ces six jeunes en bord de route, stressés dans l’attente d'une reprise de la circulation, alors que nos véhicules étaient immobilisés depuis plusieurs heures.
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Fébriles, leurs conversations relataient les détails des derniers attentats et attaques de groupes armés ayant opéré dans la région. Ces récits, glanés dans la presse et auprès de leurs connaissances, hantaient la majeure partie des propos des passagers. C’est donc soulagés qu’ils reprennent la route vers Pahalgam, d’où il pourront se préparer au pèlerinage, principal objectif de leur aventure au Cachemire.
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Lorsque ce périlleux trajet prend fin, les jeunes amis passent la nuit chez un agriculteur du village de Pahalgam, lequel ouvre ses portes aux yatristes pendant toute la durée du pèlerinage. Leur première étape les mène par la suite à Shandavari, dernier village habité avant les cinq jours de marche qui les mèneront à travers la montagne Cachemirie. Comme la plupart des pèlerins, les Delhiites n'ont aucun matériel adapté pour affronter la montagne himalayenne. Ils ont simplement apporté leurs vêtements d'hiver et achèterons cirés, chaussures et gants pour compléter leur panoplie avant le départ tant attendu.
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Quittant le village de Shandavari avec leur nouvel équipement, chaussures de marche et bâtons de pèlerins en main, les jeunes citadins sont désormais de véritables "Yatristes". L'effervescence que ce départ engendre est palpable : ces derniers scandent sans cesse "Bam Bam Bollé!", le cri de ralliement que les dévots hurleront tout au long du chemin menant à la grotte sacrée de Shivah.
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Après deux longues journées d'ascension, les six citadins, comme beaucoup d'autres pèlerins, sentent que la fatigue et le mal de l'altitude les gagnent peu à peu. Malgré le coût prohobitif d'une monture, l'idée de se hisser sur le dos d'un cheval les séduit de plus en plus. Le pouvoir d'achat de cette jeune classe moyenne leur permet de se payer ce petit "luxe" : se faire porter avec nonchalance sur les sentiers himalayens dont ils pourront, pour le coup, admirer tout le paysage sans fournir le moindre effort. |
Ce pèlerinage ayant lieu dans des paysages splendides, souvent à l'opposé de ceux auxquels sont habitués les six Delhiites, ces derniers tentent de profiter au maximum de cette nouvelle expérience. La liberté qu'ils disent éprouver en montagne et la possibilité de se retrouver entre amis d'enfance, sans leurs familles, représente pour eux une véritable révélation, tant ils semblent s'y épanouissent. |
Après trois jours de marche, les pèlerins et les six amis parviennent à la dernière et plus importante étape de leur parcours : le plateau où se trouve la grotte sacrée d'Amarnath. Au pied de cette profonde cavité mystique, le long des larges névés toujours présents en cette fin juillet, coule le torrent glacial de l'Amravati. Malgré le froid de l'altitude et la légère bruine tombant des nuages, les six jeunes pèlerins se jettent dans une eau à deux degrés celcius. Ils disent s'y purifier avant l'entrée dans la grotte car, comme le suggère la légende, le Dieu Shivah aurait chargé ces eaux d'un nectar d'immortalité extraordinaire.
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Apaisés et encore sous le choc mystique de leur pèlerinage, que tout Hindou doit avoir fait au moins une fois dans sa vie, les six citadins prennent le chemin de la descente. Ils mettront deux jours pour rallier le petit village de Sonamarg afin de rentrer sur Srinagar, puis sur la capitale indienne.
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Les six amis de Delhi et leur "mister seven" avant de se séparer. Désormais vrais yatristes, tous reprendront leur vie après cette intermède du Amarnath Yatra : vers le travail, les études ou le voyage... |
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